Joint ce vendredi à la vacation hebdomadaire de Brest Atlantiques, Franck Cammas, skipper du Maxi Edmond de Rothschild, en tête de la course, a commenté le passage du Pot-au-noir et la situation qui l'attend, avec Charles Caudrelier, d'ici l'arrivée à Brest, programmée aux alentours du 4 décembre.

La carte postale à l’approche du Cap Vert. « On est dans une phase de reaching dans les alizés en remontant vers le Cap Vert, il y a un peu de clapot de face qui commence à s’atténuer, c’était un peu brutal cette nuit, parce qu’on était à 25 nœuds face au clapot. Là, ça s’adoucit mais le vent est un peu plus fort, 18-20 nœuds. On essaie de ne pas trop tirer sur le bateau, mais on reste rapides, ce sont des allures où Edmond de Rothschild va vite, même si on n’a pas tous les jouets en main, ça marche encore pas mal. Il fait beau, il y a des poissons volants et beaucoup de vent apparent, donc on ne sort pas beaucoup du cockpit. »

La traversée express du Pot-au-noir. « On était dans une zone sans aucune convection, il y avait juste des molles à passer, mais le vent n’était pas brutalement instable comme il peut l’être avec des orages et des grains noirs. Là, il n’y avait quasiment pas de grains, juste une toute petite pluie, le vent est quand même bien descendu à un moment, jusqu’à 6-7 nœuds, pendant quelques heures, mais le bateau est resté au-dessus de 10 nœuds et la rotation a été continue, il n’y a pas eu de gros changements de forces de vent, tout a été fluide par rapport au passage de Pot-au-noir qu’on a eu à l’aller. »

L’option du trimaran MACIF. « C’est toujours mieux quand les poursuivants restent derrière toi, il y a toujours un risque quand quelqu’un attaque par rapport au leader. On avait vu cette option ouest à un moment, même pour nous, mais on n’a jamais senti que c’était pour nous quelque chose d’intéressant. Il y avait quand même deux passages de transition à passer, il (MACIF) a eu une très bonne première transition, même s’il y avait un virement dedans, la deuxième a été un peu plus longue. On l’a surveillé, forcément, je pense que ça a été une réussite pour lui, parce qu’il a gagné une centaine de milles sur Actual, c’est la preuve que c’était une option intéressante, même si elle n’était pas simple. »

L’avance de 600 milles sur les poursuivants. « On ne regarde pas trop notre avance, on regarde surtout la situation par rapport aux phénomènes météo qui arrivent. S’il y a intérêt à continuer à avancer vite, il faut le faire, parce que ce qu’on cherche surtout, c’est un passage météo qui soit simple pour le bateau, où il y a le moins de risques pour sa préservation. Donc ce n’est pas le moment de mollir, je pense qu’il y a des trucs intéressants à prendre en vue de l’arrivée à Brest si on va assez vite et pour ne pas mettre le bateau dans des conditions compliquées. On réfléchira si on lève le pied dans les dernières 48 heures, mais ce n’est pas encore le moment. Notre première priorité est en tout cas de passer dans des endroits « safe » et de ne pas surcharger le bateau. On n’est par exemple pas à 100% à l’attaque dans les changements de voiles, on essaie d’anticiper et de ne pas sur-toiler le bateau, chose qu’on aurait pu faire les deux premières semaines. On a passé un peu de temps à faire un « check » du bateau avant le Pot-au-noir, à réparer ce qu’on pouvait, donc pour l’instant, on est assez confiants dans le bateau. Après, les casses, elles ne s’annoncent jamais, et forcément, toutes les pièces et tous les systèmes sont fatigués après 30 jours de mer, donc on n’est jamais à l’abri de casser. »

L’Atlantique Nord, l’ETA (heure estimée d’arrivée). « L’alizé est encore soutenu, au-dessus du Cap Vert, ça commence à mollir et à adonner, l’idée est de monter nord le plus vite possible vers les Açores pour attraper un front et se mettre à l’avant afin de nous permettre d’arriver à Brest dans un vent de sud. Ce serait le scénario idéal, mais le point délicat, c’est d’attraper ce vent de sud, il y aura une zone un peu de mou et de portant. C’est pour ça qu’on avance vite maintenant. Après, ce sera l’autoroute, mais pas forcément une autoroute simple, puisque ce sera du reaching dans 20-25 nœuds, donc ça ira vite, il faudra faire attention au bateau et gérer pour la fin. Si on arrive le 4, c’est qu’on aura eu une bonne météo, ce serait bien. »

Photo : Yann Riou/PolaRyse/Gitana SA