Quatre trimarans de la classe Ultim 32/23 prendront le départ de Brest Atlantiques le 3 novembre de Brest. Du plus ancien, Actual Leader, au plus récent, Sodebo Ultim 3, ils ont tous leur propre histoire, mais un objectif commun : devenir toujours plus ultime…

Actual Leader

Plus ancien bateau de la flotte, Actual Leader a eu plusieurs vie. La première sous le nom de Geronimo, débutée à l’automne 2001, date de la mise à l’eau de ce trimaran de 33,80 mètres spécialement conçu par le cabinet VPLP pour une campagne de records océaniques (jusqu’ici, la « mode » était aux catamarans) et construit chez Multiplast pour Olivier de Kersauson. Ce dernier parviendra notamment à s’emparer à ses commandes du Trophée Jules Verne (63 jours 13 heures 59 minutes et 45 secondes) en avril 2004. La deuxième commence neuf ans après ce record, lorsque Thomas Coville, ex équipier d’Olivier de Kersauson, et Sodebo, désireux de gagner en performance par rapport à leur premier trimaran (plan Irens/Cabaret qui sera vendu à Yves Le Blévec et Actual) sans pour autant construire un bateau neuf, récupèrent en 2013 la plateforme sur un quai brestois, où elle se trouvait depuis six ans, pour la transformer en bateau de solitaire (nouvelle coque centrale de 31 mètres, nouveau mât, bras de liaison renforcés, ajout de foils…). A sa barre, Thomas Coville parvient à décrocher son Graal le 25 décembre 2017, en établissant un nouveau record du tour du monde en solitaire en 49 jours 3 heures 4 minutes et 28 secondes, avant de décider, avec son partenaire, de construire un nouvel Ultim à l’horizon 2019 et donc de vendre l’ex Geronimo fin 2018.

L’heure pour ce dernier de démarrer une troisième vie : avec le soutien d’Actual, Yves Le Blévec, qui vient de perdre son bateau après avoir chaviré au large du Cap Horn lors d’une tentative de record du tour du monde à l’envers, saisit l’opportunité et prend possession du trimaran Ultim à l’arrivée de la Route du Rhum 2018. Six mois et 14 000 heures de travail plus tard, le lundi 13 mai 2019, il est remis à l’eau à La Trinité-sur-Mer sous le nom d’Actual Leader. « Ce gros chantier a d’abord consisté à mettre le bateau à nos couleurs, ce qui nous a permis de vérifier l’état de la coque centimètre carré par centimètre carré. L’autre gros dossier a touché à tout ce que l’on appelle l’électrologie, à savoir l’électricité, l’électronique et l’informatique. Là-dessus, nous avons relevé notre niveau d’exigence, puisque nous avons quasiment tout refait, c’était une façon de s’approprier la partie centre nerveux du bateau », explique Yves Le Blévec. Depuis la mise à l’eau, ce dernier, avec son co-skipper de Brest Atlantiques, le Catalan Alex Pella, son équipe navigante et quelques experts invités (Jean-Baptiste Levaillant, Benoît Marie, Kevin Bioch…), s’est attaché dans un premier temps à découvrir et à apprendre à faire marcher son nouveau géant des mers, avant, dans un second temps, de se concentrer davantage sur la performance. « Aujourd’hui, on a un ensemble qu’on commence à bien connaître, même si on en saura forcément beaucoup plus à la fin de Brest Atlantiques, parce que ce qui nous manque, c’est le facteur durée », conclut le skipper, avant de mettre le cap sur Brest.

Trimaran Macif

Née dans la tête de François Gabart lors de son Vendée Globe victorieux (2012-2013), l’idée du trimaran Macif, à même de lui permettre d’assouvir sa soif de « nouveaux challenges » et de « toujours repousser ses limites », devient concrète le 18 août 2015 lorsque le plan VPLP, après 18 mois de chantier, sort du hangar de CDK Keroman Technologies à Lorient. Un bateau qui marque une rupture avec les générations précédentes : la Coupe de l’America 2013 et la révolution foils sont passées par là et l’objectif des architectes et des bureaux d’études est de parvenir à terme à faire voler au large des maxi-trimarans de plus de 30 mètres, comme ce Macif plutôt léger (14,5 tonnes), doté de coques très affinées, d’une cabane de vie de plain-pied sur la coque centrale, d’un cockpit protégé et de plans porteurs, notamment des foils en L. Moins de trois mois après la mise à l’eau, François Gabart remporte la Transat Jacques Vabre avec Pascal Bidégorry, il récidive en solitaire six mois plus tard sur The Transat avant de s’attaquer le 4 novembre 2017 au record du tour du monde en solitaire de Thomas Coville qu’il bat, 42 jours 16 heures 40 minutes et 35 secondes plus tard, de quasiment une semaine !

Débute alors une phase de développement pour le 100 pieds, qui le 31 juillet 2018, est remis à l’eau dans une version 2 destinée à le faire passer dans une dimension encore plus volante : nouveaux foils et safrans relevables en T, nouvelle bôme, voiles plus légères aux géométries revues, ajout de bâches en 3Di pour limiter la traînée aérodynamique… « Après plus de deux ans au cours desquels nous avions principalement travaillé sur la fiabilisation, nous nous sommes concentrés sur la performance, donc sur le vol, l'enjeu de performance majeur du moment, cette V2 va nous permettre de voler plus tôt, plus haut », explique alors François Gabart.  Handicapé par d’importants problèmes techniques (pertes d’un foil et d’un safran), ce dernier prend trois mois plus tard la deuxième place de la Route du Rhum au terme d’un haletant duel autour de la Guadeloupe avec Francis Joyon. Après un nouveau chantier début 2019, le trimaran, encore optimisé (changement de systèmes de foils, amélioration de l’assiette du bateau…), a été remis à l’eau le 22 mai 2019, ce qui fait dire à Antoine Gautier, directeur des études de l’équipe Macif , avant Brest Atlantiques : « Aujourd’hui, on doit aller 20 ou 30% plus vite que la version mise à l’eau en 2015, quand ce n’est pas 50% à certaines allures, c’est énorme, un autre monde. 

Photo : Alexis Courcoux/Macif